Biscotte, portrait d’une jeune femme en chemin
100 % Niçoise, annonce fièrement Biscotte. Silhouette frêle, casquette vissée sur de longs cheveux bruns encadrant des yeux noirs. Grosses pompes et sac à dos. Deux chiens dans son sillage, plus les chiots. Une dégaine d’adolescente, mais un caractère bien trempé. Elle veut bien parler, raconter un peu sa vie. A condition de ne pas donner son prénom. D’accepter celui qu’un ami cher lui a donné et qu’elle a adopté. Biscotte.« Parce que c’est croustillant et sans prétention. Comme moi », lance-t-elle dans un demi-sourire.
Née à Nice, donc, elle y a grandi, y a joué au foot. Son blouson affiche les couleurs de l’OGC Nice et elle en est fière. Elle y est allée à l’école, aussi. Pas de bons souvenirs, ça. Collège raté, études avortées.
« J’allais en classe pour dormir. J’ai fait de la merde. Après ça, aucun lycée ne voulait de moi », annonce-t-elle. Petite pointe de regret dans la voix. Peut-être se dit-elle que la vie aurait pu tourner autrement. A 18 ans, son père la chasse de la maison. Elle débarque alors au Mans.
Elle squatte à droite à gauche, chez des connaissances qui acceptent de l’accueillir pendant la période hivernale. Mais c’est compliqué d’être hébergée avec les chiens. Alors elle dort aussi, parfois, à la rue. « Une cinquantaine de nuits, au moins », dit-elle sans s’appesantir. C’est ainsi qu’elle commence à fréquenter la Halte Mancelle, pour y prendre une douche, déjeuner, laver son linge.
Aujourd’hui, Biscotte loue un appartement dans le parc social. Même si sa situation économique reste précaire, l’avenir s’éclaire un peu. Car elle sait où elle va. L’an passé, elle a travaillé quelques mois dans une sandwicherie. La révélation. « Je me suis rendue compte que je mettais tout mon cœur dans chaque sandwich que je préparais. Je voulais que le client, quand il croque dedans, le trouve délicieux. Et j’ai compris que c’est ce que je veux faire. Travailler dans la restauration ».
A la Halte Mancelle, où elle prend encore ses repas, Biscotte est facile à trouver. Aussitôt le repas terminé, elle file en cuisine, rejoindre Marie et les bénévoles. Elle enfile un tablier et s’attelle à la vaisselle. « La plonge, c’est mon kiffe », s’amuse-t-elle, les bras plongés jusqu’au coude dans l’eau savonneuse. Avant de partir, une bénévole glisse dans son sac à dos un petit bidon de soupe. Le reste du repas.